Reprendre les études, mais ça vient d’où ?
Honnêtement, les études supérieures et moi c’était pas gagné : j’ai redoublé trois fois dans mon cursus supérieur après des études dans le secondaire sans faute, couronnées par une mention très bien au bac.
Notez-bien que je ne dis pas ça pour me la péter, mais pour illustrer à quel point la chute et la transition furent rudes de tête de classe aux tréfonds du classement.
J’ai connu la réussite académique, et j’ai connu la désespérance profonde des échecs à répétition, de la quête de sens ou d’une voie d’orientation qui n’aboutit pas.
J’ai donc redoublé trois fois, et j’ai changé quatre fois d’établissement, et j’ai fini par obtenir un master 2 au bout de huit ans. J’avais fait le job in fine – mes deux dernières années ont été des années normales, et enfin gratifiantes, mais ces huit ans m’ont épuisé, dégoûté.
23 ans après, rétrospectivement, je connais les raisons de ces galères et il m’a fallu un long processus de plus de trois ans pour comprendre tout ça et dévider les fils de ma pelote personnelle.
La question de la formation s’est posée environ un an après mon bilan de compétences. Mon projet s’affinant peu à peu, évoluant par à-coups, j’ai eu besoin de me former. Pourquoi ? Parce que simplement j’aime apprendre, j’aime aussi aller au fond des choses, et si possible savoir de quoi je parle ^^
Je me suis assez longtemps interrogée, n’arrivant pas à regarder autre chose que des formations « privées » plus ou moins longues et très payantes. J’étais encore conditionnée par mon ancien milieu professionnel et j’avais du mal à élargir mon champ de perspectives.
Quelques mois plus tard (oui c’est long ^^), après deux entretiens avec une admirable psychologue de Pôle Emploi, en train de rechercher des éléments dont elle m’avait parlé, tout ce que je trouvais tombait dans le champ d’étude de la psychologie. Et là, bim (paf, badaboum, ce qui fonctionne pour vous), le besoin impérieux de m’inscrire en licence de psychologie s’est imposé.
Pour une fois, j’ai eu de la chance, et je suis tombée pile poil dans les clous à la fois pour Parcours Sup et pour déposer des dossiers de validation d’acquis à l’Université, pour accéder directement en L2.
J’ai posé une candidature pour une L1 Psycho à l’Université Jean Jaurès sur Parcours Sup, et une candidature en L2 via une VA85, validation des acquis par expérience professionnelle. J’ai foncé, bille en tête, sans arrière pensée, j’ai tout donné pour le dossier, et rétrospectivement, je ne suis pas sûre qu’il fût nécessaire de stresser autant…
Le grand moment de cette période, sans conteste, aura été le moment de l’inscription administrative à la fac, où je me suis revue littéralement vingt ans plus tôt face au même type de formulaire, rentrant les même choses dans les même champs, sauf que là, c’était une formation que j’avais choisie et pas subie.
Parfois, on se sent puissamment en phase avec soi-même, parfaitement aligné et c’est ce que j’ai ressenti à ce moment là. Comme on le verra plus tard, il est bon de se rappeler de ces moments là ; quitte à les noter quelque part, c’est très utile pendant les moments de doute et/ou de galère.
Reprendre les études, un peu plus concrètement
Reprendre ses études à quarante ans, après une première partie de vie familiale, et professionnelle, est un challenge. Dans mon cas, la montée en pression à été progressive, et les partiels en ont été le point d’orgue. (Pour l’instant, j’ai le sentiment de ne pas être au bout de mes peines)
C’était assez drôle de retourner à l’Université « physiquement », de trainer des pieds, en retrouvant le pas nonchalant de l’étudiante que je fus, remettre son bon vieux Eastpack sur les épaules et déambuler dans une nouvelle fac. La troisième depuis mes débuts 🙂
Assez rapidement, j’ai repris mes vieux réflexes d’étudiante, mais en mieux. J’ai vieilli, j’ai mûri, et il est très plaisant de constater qu’on ne repart pas de zéro, mais que l’expérience a bonifié la façon que j’avais d’aborder les cours.
Un autre point réjouissant : le constat que refaire travailler son cerveau, et notamment en terme de mémorisation, a un effet très rapide sur nos fonctions cognitives. C’était vraiment un sujet d’inquiétude me concernant : après toutes ces années, est-ce que mon cerveau ne s’était pas trop ramolli ?
Réponse : oui, il s’était franchement ramolli sur les compétences attendues d’un étudiant, et notamment engranger les cours, se remettre dans une situation d’apprenant « scolaire » MAIS ! tout est revenu très vite. Il faut vraiment se tranquilliser de ce côté-là.
Les deux parties les plus difficiles ont été de mon point de vue encaisser la masse de travail sur la fin de semestre : deux dossiers en groupe à rendre viennent faire exploser la charge dédiée aux études et bouleverser les emplois du temps, et sur la fin d’année, il a fallu accepter de passer tout mon temps libre ou presque à bûcher.
Reprendre ses études en travaillant pèse lourdement sur l’organisation familiale, autant y être préparé, anticiper au maximum les soirées de cours, de travail en groupe : faites fonctionner la solidarité pour les repas, les enfants, ou comme dans mon cas, apprenez les basiques de la cuisine à vos enfants, ça sera toujours utile ^^
Ne cherchez pas l’exhaustivité ou la perfection, il y a des rattrapages, des possibilités de passer vos années en plusieurs fois…
Facile à dire je vous l’accorde, mais on y laisse des plumes au moment des fêtes…
Reprendre les études, ça m’a apporté quoi (so far) ?
A l’heure actuelle, j’attends les notes du premier semestre, et les cours ont redémarré pour le deuxième. Je change avec plaisir mes méthodes de travail, j’utilise de nouveaux outils : WooFlash, Audacity, j’apprécie réellement de voir comment ont évolué mes méthodes d’apprentissage en vingt ans.
Avoir choisi ce cursus, qui fait écho à mon travail de cheffe de projet « Outils Numériques » chez Aspie-Friendly, et bien sûr également aussi à ma démarche de proposer des bilans (orientation, compétences) ou accompagnements (organisation, « job coaching »…) fait parfaitement sens et me nourrit déjà dans mes pratiques au quotidien.
Je retiens de mes apprentissages de ce semestre (nonobstant mes notes…et j’ai conscience du luxe que j’ai de reprendre les études avec déjà un diplôme de Master 2 en poche) :
- J’ai appris à lire un article scientifique, compétence qui me manquait, notamment pendant la pandémie où je butais sur certaines études, je me sens plus armée pour comprendre certaines polémiques ou critiques concernant la démarche scientifique de tel ou tel projet.
- J’ai vaincu mon aversion pour la psychanalyse en réussissant à « entrer » dans le cours. Je peux donc plus librement être critique envers cette méthode, parce que je sais de quoi je parle.
- J’ai accès des milliers de références grâce à la bibliothèque universitaire.
- Chaque UE m’a ouvert une porte vers la possibilité d’approfondir chaque matière avec les bonnes clés.
- Je me suis découvert un véritable intérêt pour la psychologie du développement.
- J’ai appris comment j’aurais du être accompagnée au cours de mes différents diagnostics, et le bienfait que la psychoéducation aurait eu sur moi pendant cette période.
- Quand on a comme moi beaucoup « consommé » du psychologue, attendu beaucoup de leur part pour expliquer son fonctionnement, passer dans l’envers du décor pour comprendre leur formation a un effet à la fois vertigineux et satisfaisant, de comprendre mieux certaines choses.
- Je fais de belles rencontres, je découvre une vraie solidarité entre étudiants en distanciel.
Que me réserve la suite ? Je ne sais pas… beaucoup de révisions, d’apprentissages, de découvertes. Probablement des ascenseurs émotionnels, des coups de stress et des bulles de joie. Sans doute des déceptions, des portes ouvertes qui vont se refermer, et des portes dont je ne soupçonne pas encore l’existence qui vont s’ouvrir….
A suivre donc, en attendant, cap sur la psychologie cognitive, sociale et les neurosciences !
Delphine H.